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3 questions à Solrey

Publié le mar 09/04/2024 - 09:45
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Solrey - Photo : DR
Solrey - Photo : DR

 

Après l’hommage du Philhar à Maurice Jarre, l’Orchestre National visite l’univers de Philippe Sarde, indissociable des films de Claude Sautet. Nous avons interrogé Solrey, interprète, directrice musicale, artiste vidéaste, passionné par le lien entre musique et image. 

 

D’où vient ce goût pour la transdisciplinarité ?  

Mes spectacles déclinent toujours une narration, une relation à l’écriture littéraire. Jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, il est vrai que j’ai été concentrée sur l’étude du violon. Ma curiosité était toujours stimulée par de multiples désirs, ce qui m’a amenée à étudier la musique baroque, les musiques populaires, tziganes, jazz, pour parvenir à une vision plus complète des différentes techniques de jeu que peuvent offrir chaque style de musique. J’ai, par ailleurs, passé mon adolescence à fabriquer de petites mises en scène, liant littérature et musique. Dans ma carrière, j’ai donc rapidement ressenti le besoin de m’ouvrir à d’autres possibilités :  la musique de film puis le théâtre. J’ai toujours « augmenté » la réalité de mon métier de musicienne. Aujourd’hui, c’est un mouvement perpétuel pour moi : l’image entraîne la musique, la musique entraîne l’image.  

Avec Alexandre Desplat, vous avez travaillé sur de très nombreuses musiques de films, certaines parmi les plus célèbres de ces dernières décennies. Quels projets vous ont le plus marqué ?  

Toute la collaboration avec Jacques Audiard a été très créative, au niveau de la composition par Alexandre, et de l’interprétation qui en découlait. L’écriture scénaristique d’Audiard, épurée, rythmée , incisive, a magnifié notre complicité. L’écriture pour les cordes a été pour moi l’occasion de défendre une approche non-romantique ; je souhaitais que les musiciens appréhendent le son d’une manière plus organique, et qu’ils acceptent de laisser sonner leur instrument dans son essence originelle. Ce son est devenu l’une des particularités de notre travail. C’est important, car une bande originale ne peut pas être redondante par rapport à ce qui se passe sur l’écran. La musique peut ouvrir l’imaginaire du spectateur en lui proposant un monde émotionnel parallèle.  

Ce travail sur les cordes peut évoquer une figure essentielle de la musique à l’écran : Bernard Herrmann… 

Tout à fait, c’est une référence essentielle. Son travail sur les techniques de jeu de l’orchestre à cordes, notamment pour Psychose d’Alfred Hitchcock, est d’une grande sophistication, et je me suis employée à « communiquer » cette richesse à Alexandre qui, en tant que flûtiste, était légèrement plus éloigné de ce monde que moi, violoniste. Ensemble, nous avons tenté d’obtenir une précision absolue sur l’organicité du son des cordes, à travers des transcriptions que nous réalisons pour mes projets. À la recherche de sonorités nouvelles, j’ai convoqué pour mon dernier spectacle, Ciao Casanova, la présence d’une mezzo-soprano et d’une harpe, deux « instruments » avec lesquels je n’avais pas encore travaillé et qui ouvrent un autre espace sonore. Il est essentiel, pour moi, d’explorer des voies nouvelles et de cultiver sans cesse mon désir de découverte. La musique est un art exceptionnel, infini. 

Propos recueillis par Gaspard Kiejman 

Les Choses de la vie de Claude Sautet 

Titre
4 avril